Gardel et sa mère à bord du "Dom Pedro" (1893)
Gardel à bord de l'Infanta Isabel. Sa rencontre avec Enrico Caruso (1915)
Gardel à bord de l'Antonio Delfino (1923)
Le "Conte Rosso"de la compagnie italienne ‘‘Lloyd Sabaudo’’ |
Sa
construction débuta en Écosse peu de temps avant la première guerre mondiale,
mais durant ce conflit, sa structure fut modifiée pour en faire un des premiers
porte-avions britanniques : le ‘‘HMS Argus’’.
Après les hostilités, on construisit un
nouveau navire qui fut baptisé ‘‘Conte Rosso’’ (en français : le Comte
Rouge), surnom d’Amédée VII de Savoie, fils du ‘Conte Verde’’ (le Comte Vert)
qui, à la différence de son père préférait porter des vêtements de couleur
rouge, et qui mourut de manière suspecte en 1391, à l’âge de 23 ans.
Le paquebot débuta ses traversées en 1922 sur la ligne maritime Gênes-New York, puis en 1928, il fut affecté avec son navire jumeau, le "Conte Verde", sur la ligne de Gênes vers l’Amérique du Sud.
Les publicités mettaient en avant la vitesse et le luxe de la ligne maritime Méditerranée-Amérique Latine qui partait de Gênes avec escales à Villefranche sur mer, Barcelone, Rio de Janeiro, Santos, Montevideo et arrivait à Buenos Aires. Dans le sens de l’Amérique vers la Méditerranée , le navire faisait escale à Cadix (Espagne)[1].
Photo aérienne de Nice (Source : www.geoportail.gouv.fr)
Les passagers étaient amenés à terre dans de petites embarcations comme on peut le voir sur la carte postale suivante qui montre le transatlantique italien "Augustus" de la "Navigazione Generale Italiana" en train de transborder des passagers qui empruntent une passerelle fixée sur le flanc du navire.
Escale à Villefranche sur mer du paquebot "Augustus", lancé en 1927. (Carte postale - Collection personnelle de Georges Galopa) |
Détail montrant le transbordement des passagers de l’ "Augustus" |
En 1932, le "Conte Rosso" desservit la ligne maritime Trieste-Bombay-Shanghai ; le 3 décembre 1940 il fut transféré à la marine de guerre italienne comme transport de troupes. Il fut torpillé par le sous marin britannique ‘‘HPS Hupholder’’ [2], le 24 mai 1941 à 20h40, alors qu’il transportait des troupes en direction du nord de l’Afrique. Il coula en quelques minutes provoquant la mort de 1297 personnes sur les 2600 qui étaient à bord.
Par son luxe et l’excellence du service de bord, le ‘‘Conte Rosso’’ fut immortalisé par le tango ‘‘Barajando’’[3] de Nicolas Vaccaro et Eduardo Escáriz Méndez que Gardel enregistra le 11 décembre 1929[4] .
Con las cartas de la vida por mitad bien marquilladas,
Como guillan los malandros carpeteros de cartel,
Mi experiencia timbalera y las treinta bien fajadas,
Me largué por esos barrios a encarnar el espinel.
Ayudado por mi cara de galaico almacenero
Trabajándose a la sierva de una familia de bien,
Y mi anillo de hojalata con espejo vichadero,
Me he fritado muchos vivos, como ranas al sartén.
Pero, en cambio, una percanta que me tuvo rechiflado
Y por quien hasta de espaldas con el lomo caminé,
Me enceró con un jueguito tan al lustre preparado
Que hasta el pelo de las manos de cabrero me arranqué.
Mientras yo tiraba siempre con la mula bien cinchada,
Ella, en juego con un coso mayorengo y gran bacán,
Se tomaba el Conte Rosso, propiamente acomodada,
Y en la lona de los giles me tendió en el cuarto round.
Me la dieron como a un zonzo, pegadita con saliva,
Mas mi cancha no la pierdo por mal juego que se dé
Y, si he quedao arañando como gato panza arriba,
Me consuelo embolsicando la experiencia que gané.
En el naipe de la vida, cuando cartas son mujeres,
Aunque lleve bien fajadas pa'l amor las 33,
Es inútil que se prendan al querer con alfileres,
Si la mina no es de un paño, derechita y sin revés.
Ce n’est pas le seul lien du navire avec le tango. Le 10 février 1928, le programme musical du ‘‘Conte Rosso’’ comprenait le tango ‘‘Un Tropezón’’ de Raul de los Hoyos et Luis Bayón Herrera, que Gardel avait enregistré en juillet de l’année précédente[5] , ce qui démontrait le succès du disque et la renommée croissante du chanteur au niveau international, bien avant ses débuts sur les scènes parisiennes.
Menu du déjeuner du ‘‘Conte Rosso’’ du 20 décembre 1927 |
Billet de deuxième classe Barcelone-Gênes, septembre 1931 |
LES VOYAGES DE GARDEL
Gardel eut recours aux services de la Compagnie Lloyd Sabaudo de 1927, année où il voyagea sur le ‘‘Conte Verde’’, jusqu’en 1933 lorsqu’il quitta l’Argentine à bord du ‘‘Conte Biancamano’’.
Il fit en tout quatre traversées transatlantiques à bord du ‘‘Conte Rosso’’, et on peut facilement l’imaginer déambulant dans les dépendances du navire.
PREMIER VOYAGE : Barcelone-Buenos Aires, 1928
Le billet le plus économique coûtait 619,90 pesetas. En première classe, il en valait 2500.
La tournée de Gardel en Espagne se soldait par un grand succès, et durant cette période il signa à Paris son premier engagement contractuel pour venir chanter en France. Dans ce but, il retournait à Buenos Aires pour renouveler son répertoire et, chose plus importante, incorporer un guitariste supplémentaire pour enrichir l’accompagnement de José Ricardo et Guillermo Barbieri.
C’est ainsi, auréolé de ses triomphes et rempli de projets, qu’il se dirigea vers le port de Barcelone, accompagné d’un groupe d’amis et d’admirateurs, dont le footballeur Josep Samitier surnommé ‘‘le magicien du ballon’’, avec lesquels il fut photographié sur le pont du navire.
Lors de ce premier voyage sur le ‘‘Conte Rosso’’, Gardel utilisa le service particulier du ‘‘garage de bord’’, pour ramener en Argentine sa Graham Paige flambant neuve. Pour cette raison, il envoya un télégramme à son ami Armando Deferrari disant : « Que ‘‘El Aviador’’ [6] ne s’engage en rien, parce que je ramène une voiture ».
Parmi les passagers se trouvaient le célèbre chanteur d’opéra d’origine polonaise Adamo Didur et une troupe d’artistes allemands qui venaient s’incorporer à la « Companhia Lyrica Official » de l’imprésario Scotto.
La presse brésilienne annonçait : « Les artistes suivants accompagnent Adamo Didur : le directeur Egou Pollack, les acteurs Otto Wolf, Hany Steyer, Roberto Edliuger (SIC), Emilio Schipper, Elly Ga Krasser et le chef d’orchestre autrichien Léopold Materna »
Les archives argentines n’ont pas conservé toutes les listes de passagers de cette époque, mais la communauté hébraïque les a reconstituées selon les informations recueillies par le CEMLA (Centre d’Études Migratoires Latino-Américaines), en confirmant pour ce voyage, la présence de certains artistes mentionnés ci-dessus et en complétant la liste nominative de passagers.
Nota : Cette liste de passagers indique le 1er juin comme date d’arrivée à Buenos Aires, alors qu’il s’agit de la date de départ de Barcelone. |
Le ténor uruguayen Víctor Damiani, qui venait de se produire à ‘‘La Scala’’ de Milan, et son ami José Ganduz débarquèrent à Montevideo. Ils ne sont pas mentionnés sur cette liste qui ne prend en compte que les passagers qui ont débarqué à Buenos Aires.
Par chance, une série de photographies prises durant la traversée témoignent d’agréables moments de détente de Gardel avec Adamo Didur et sa fiancée Marguerite Vignon (une ballerine française qu’il épousera quelques mois plus tard).
Les vêtements portés par Gardel et ses amis montrent que les photos de droite n’ont pas été prises au même moment que celles de gauche.
Photo en haut à gauche : Gardel, Marguerite Vignon, Victor Damiani, José Ganduz et Adamo Didur. |
Le 12 Juin 1928, le ‘‘Conte Rosso’’ fit escale à Santos où descendirent 86 passagers tandis que les 603 passagers restants continuèrent leur route. Grâce au formulaire d’émigration, nous savons que le capitaine du navire s’appelait Amedeo Pinceti [7] et que l’équipage se composait de 422 personnes.
Le capitaine Amedeo Pinceti, commandant du ‘‘Conte Rosso’’ en 1928 |
Durant la nuit du jeudi 14 juin 1928, le transatlantique s’amarra dans le bassin nord du port de Buenos Aires. Dans le quartier de l’Abasto, Berthe Gardes fêtait son 63ème anniversaire et le retour de son fils couronnait cette célébration. (Que lui a-t-il offert?)
DEUXIÈME VOYAGE : Barcelone – Buenos Aires, 1929
Le 2 juin 1929, le journal ‘‘El Plata’’ de Montevideo reproduisait ces lignes : « Un quotidien de Barcelone (…) dans une intéressante chronique motivée par la présence de Carlos Gardel dans cette ville (…) Vendredi, nous avons passé trois heures en sa compagnie. Nous avons dîné, parlé, bu, et en se promenant, il nous a accordé une interview (…). Le 5 juin il embarquera pour Buenos Aires sur le ‘‘Giulio Cesare’’…Malgré cette affirmation, l’information était inexacte : le ‘‘Giulio Cesare’’ n’appareillait pas le 5, mais le 7 juin, ce qui fit que Gardel quitta l’Espagne le vendredi 31 mai à bord du ‘‘Conte Rosso’’.
Après un séjour prolongé à Paris, où il se produisit sur les scènes du Théâtre Fémina, du Cabaret Florida, de l’Opéra, de l’Empire, puis à Cannes et à Madrid, Gardel rentrait à ‘‘Son Buenos Aires adoré’’* avec la contrariété dûe à la séparation de son guitariste José Ricardo – qui l’avait accompagné depuis 1915 - à cause d’un désaccord avec José María Aguilar, le nouveau guitariste engagé quelques mois auparavant.
*allusion au Tango « Mi Buenos Aires querido » (Mon Buenos Aires adoré)
Le 11 juin, après onze jours de voyage, le navire fit escale au port de Santos (Brésil), selon l’itinéraire Gênes-Villefranche sur mer-Barcelone-Rio de Janeiro-Santos-Montevideo. A partir de cette date, les voyages de Gardel sur le ‘‘Conte Rosso’’ se feront sous le commandement du capitaine Vittorio Olivari (cité parfois Calegari) ayant sous ses ordres un équipage de 409 personnes.
Le 17 juin 1929, à 13 heures, le "Conte Rosso" accosta dans le bassin nord du port de Buenos Aires, ‘‘amenant de nombreux passagers, du courrier et des marchandises diverses’’
Débarquaient ce jour là parmi les passagers, le journaliste brésilien Dr. Paulo de Magalhanes (directeur des publications ‘Ilustración Nacional’ et ‘A Patria’ et collaborateur du journal ‘O Paiz’), Bottaro Costa, ancien Ministre Plénipotentiaire d’Italie en Argentine, José Ciabatti, G. B. Pellizatti, le Docteur Alberto Stucchi, le ténor Pedro Lafuente et la soprano Rosa Menke.
Ces noms - cités par la revue ‘‘Crítica’’ - n’apparaissent pas tous sur les registres de migrations argentins, cependant il est intéressant de parcourir la liste des passagers reproduite ci-après et qui contient les noms de Miguel Bonano et de Guillermo Desiderio Barbieri, guitariste de Gardel.
Par contre, le retour à Buenos Aires du chauffeur de Gardel, Antonio Sumaje (surnommé ‘‘El Aviador’’), pas plus que la voiture Graham Paige que Gardel avait embarquée à l’aller pour ses déplacements en Espagne et en France ne sont mentionnés.
Nota : On remarque, une fois encore, l’erreur sur la date d’arrivée du bateau à Buenos Aires |
Gardel fut accueilli par José Razzano – qui était alors son représentant artistique – et il accorda une interview que le journal ‘‘La Nación’’ publia le jour suivant, et dans laquelle il rendait compte du succès qu’il avait obtenu en Europe.
TROISIÈME VOYAGE : Buenos Aires – Villefranche sur mer, 1930
Le 4 décembre 1930, le ‘‘Conte Rosso’’ arriva à Buenos Aires en provenance de Gênes d’où il était parti le 20 novembre. Deux jours plus tard, après avoir fait le plein de combustible et remis en ordre les dépendances du navire, le transatlantique repartit vers l’Italie.
Gardel embarqua à Buenos Aires le samedi 6 décembre à 22 heures, accompagné par ses guitaristes Barbieri, Aguilar et Riverol, pour se rendre à Villefranche sur mer. Il avait réalisé cette année là une importante tournée commencée à Buenos Aires, puis poursuivie à l’intérieur de l’Argentine et en Uruguay. Il avait accompagné à Montevideo les équipes nationales de ces deux pays lors de la première coupe du monde de football et il débuta dans le ‘‘cinéma parlant’’ en chantant dans 15 "sketchs", sous la direction d’Eduardo Morera, qui utilisait le nouveau système « movietone ».
Le"Conte Rosso"arrivant au port de Rio de Janeiro. Voici le paysage que vit Gardel. |
Le 10 décembre 1930, le navire fit escale à Rio de Janeiro, où débarqua Enrique Rodríguez Larreta. Vittorio Olivari était toujours le commandant du navire et l’équipage se composait de 413 personnes. Alberto Parenti était le médecin de bord et il y avait 546 passagers en transit.
Le lendemain, Gardel fêtait son 40ème anniversaire, et bien qu’on ne dispose pas de photos, ni de témoignages, nous pouvons imaginer qu’il fut célébré avec ses compagnons de voyage et les amitiés liées par les circonstances du bord.
Gardel et le capitaine Olivari (1929, 1930 ou 1931 ?) |
Le 21 décembre 1930, le “Conte Rosso” fit escale à Barcelone, comme l’indique ci-après le journal “La Vanguardia”:
En se basant sur cette information, nous pouvons déterminer l’arrivée du navire à Villefranche sur mer au 22 décembre 1930 sachant qu’à la vitesse commerciale du navire de 19 nœuds, le “Conte Rosso” mettait environ 13 heures pour parcourir les 277 milles marins qui séparaient ces deux escales.
En rade de Villefranche sur mer, Gardel dut descendre par la passerelle du"Conte Rosso"jusqu’à une navette qui le transporta sur la terre ferme. |
Après avoir débarqué, Gardel et ses guitaristes prirent le chemin de Paris, où ils devaient se produire au Théâtre “Empire” le 26 décembre 1930.
QUATRIÈME VOYAGE : Buenos Aires–Villefranche sur mer?-1931
Le mercredi 28 octobre 1931 à 22 heures, Gardel repartit vers l’Europe pour son dernier voyage à bord de ce vapeur. Deux mois à peine après son arrivée à Buenos Aires, il retournait sur le vieux continent pour se détendre, et se lancer ensuite dans de nouveaux projets cinématographiques après le succès du film « Luces de Buenos Aires » (Lumières de Buenos Aires) qui lui ouvrait de nouvelles portes chez Paramount, sa compagnie cinématographique.
Un groupe d’amis vint au port pour le saluer avant son départ : Il y avait Alfredo Deferrari, Antonio Sumaje ("El Aviador", son chauffeur) son collaborateur Armando Defino, le pianiste Luis Riccardi, Enrique Pecci, José Razzano, Ernesto Laurent, Mauricio Goddard (des disques Odéon) et son fils, Ignacio Corsini, Francisco Canaro et son épouse Martha.
Le 31 octobre, après 2 jours et 19 heures de traversée, escale de Montevideo comprise, le ‘‘Conte Rosso’’ jeta l’ancre à Santos. Vittorio Olivari était toujours capitaine du navire dont l’équipage se composait de 411 personnes, comme l’indique l’en-tête du document ci-dessous.
Le journal "A Noite" de Rio de Janeiro publia dans son édition du 2 Novembre un article sur les passagers du “Conte Rosso” et, à part, un bref reportage sur Carlos Gardel.
Le Docteur Franz Messner est parti pour Vienne, suivi par le Général Pietro Oltolini qui va à Rome.
PHOTO: Assis, M. le Dr. Antonio Reischel, Ministre Plénipotentiaire de l’Autriche au Brésil, avec son épouse et Mme. Messner. Debout, M. le représentant du Cable Sous-marin Italien et le Dr. Franz Messner.
Après avoir commenté les motifs du voyage de M. Franz Messer, de M. le Dr. Pietro Oltolini et du Général Pietro Marini, le journal “A Noite” publia les noms des passagers les plus notoires:
“Parmi les passagers qui voyagent sur le paquebot de la Lloyd Sabaudo, on relève les noms suivants: Giuseppe d’Andrea et famille, M. le capitaine Cesar Gerolimich et son épouse, Hernan Greenwood, Hernan Honeysett, Berta E. de Honeysett, maître Silvio Piergili, Berenice de Piergili, Augusto Hercules Scarpini, Federico García Sanchez (SIC), José María Jaureguialzo, Arnaldo Angaroni, Benjamín P. Montes, Henry A. Picot, Carlos Gardel, José González, Maximina González, María Luisa Vivel de Merenciano, Ruggero (ilisible), Dr. Manoel Novoa, Margarida O’Neill, Domingo Rava, Conde Mariangelo Matarazzo, Dr. Pedroli, Dr. León L. Reits, Famille Azevedo, P. Pini, Professeur Enrico Vio et bien d’autres”
À la dernière page, un article dedié à Gardel:
Carlos Gardel voyage à bord du “Conte Rosso”
Carlos Gardel, l’idole de l’Argentine, le maître du tango qui fait délirer le Tout-Paris et qui vient de signer un contrat pour tourner des films aux États-Unis d’Amérique, vient de passer par Rio à bord du “Conte Rosso”.
Nous avons parlé avec lui de ses projets artistiques.
Gardel, plein d’enthousiasme, a dit à "A Noite" que son plus grand succès est le tango “Confesión”, d’Enrique Discépolo, que toute l’Argentine le chante et qu'étant réprésentatif de la chanson regionale, il sera porté à l'écran.
Nous avons demandé au chanteur portègne s’il était possible d'en connaître les paroles, et très aimablement il a écrit le texte suivant…”
L’article se termine par les paroles du tango, écrites par Gardel. On comprend alors que la photo qui illustre le texte, où on peut voir Gardel stylo en main, a été prise au moment où il les écrivait.
Gardel chante "Confesión"
Cette information qui dévoile les projets cinématographiques de Gardel est intéressante. Cependant, tous ses plans changèrent lorsqu'il s'associa à Alfredo Le Pera.
La presse espagnole indiquait que le 9 novembre 1931, le ‘‘Conte Rosso’’avait fait escale à Las Palmas aux Canaries, et qu’avec Gardel voyageaient l’écrivain et journaliste espagnol Federico García Sanchiz, « le général italien Piero Marini, la comtesse Mariangela Matarazzo et le docteur Pietro Oltolini, agent général et directeur de la Compagnie de navigation Lloyd Sabaudo au Brésil ».
Cette information de la presse espagnole a permis de déterminer la date précise de la photographie de Gardel avec Federico García Sanchiz et le capitaine Vittorio Olivari, faussement datée de 1926.
Le 12 novembre 1931, le ‘‘Conte Rosso’’ fit escale à Barcelone, puis il atteignit la rade de Villefranche sur mer après une demi-journée de navigation. Cependant nous n’avons pas pu déterminer le lieu exact où Gardel a débarqué.
Nous savons que le 8 décembre Gardel était à Paris et bien que cette information ne puisse pas répondre à la question posée, en analysant les moyens de transport de l’époque, nous formulons l’hypothèse que Gardel aurait débarqué à Villefranche sur mer pour rallier Paris en train de luxe, un voyage de 14 heures en wagon avec compartiments couchettes.
A l’inverse, la liaison ferroviaire Paris-Barcelone n’offrait pas la même facilité de voyager dans le sens Barcelone-Paris, le train rapide « Barcelone Express » ne circulant plus après le 3 octobre 1931.
Finalement, il reste la possibilité que Gardel se soit déplacé avec sa propre voiture qui était toujours en Europe en 1932. Dans ce cas, il faut tenir compte que pour parcourir les 903 kilomètres séparant Nice de Paris à la vitesse moyenne de 60km/h, ce qui semble correct pour cette époque, il fallait environ 15 heures de route, c’est à dire deux jours de voyage, arrêts inclus. Tenant en compte ce fait, il est possible que Gardel ait utilisé sa voiture uniquement pour se déplacer en ville ou pour de courts trajets.
Quatre-vingt-dix ans après son dernier voyage sur le ‘‘Conte Rosso’’, cette évocation des cinquante journées que Gardel a vécues sur ce navire contribue à mieux connaître les péripéties en toile de fond qui ont jalonné son extraordinaire carrière.
Ana Turón
Azul (Bs. As.), Argentine - 27 Novembre 2021
Collaboration et traduction : Georges Galopa
BIBLIOGRAPHIE CONSULTÉE :
LIVRES :
DAUS, Roberto. Gardel en Imágenes (Almendra Music, 1998)
GARCÍA JIMÉNEZ, Francisco. Vida de Carlos Gardel (contée par José Razzano). Bs. As., 1946.
GOBELLO, José Letras de Tango. Selección (1897-1981). Centro Editor, 1997
GUERRERO CABRERA, Manuel. Gardel en España.
MORENA, Miguel Ángel : Historia Artística de Carlos Gardel. Estudio Cronológico. Edición Definitiva Corregidor, 2008.
PELUSO, Hamlet – VISCONTI, Eduardo. Carlos Gardel y la Prensa Mundial (Crónicas, comentarios y reportajes de su época). Ed. Corregidor, 1991
ARCHIVES PUBLIQUES :
Archives de la presse du Brésil.
Archives de la presse d’Espagne.
Gallica-BNF - France.
Registres Migratoires du Brésil
Registres Migratoires d’Argentine
ARCHIVES PRIVÉES:
GALOPA, Georges.
TURÓN, Ana.
INTERNET :
https://www.buenosaires.gob.ar/museocasacarlosgardel/los-barcos-de-carlos-gardel
https://fr.wikipedia.org/wiki/SS_Conte_Rosso
http://histarmar.com.ar
http://www.timetableimages.com
https://barpequeno.wordpress.com
https://ana-turon.blogspot.com/2021/11/gardel-y-el-capitan-olivari-en-el-conte.html
https://museolibrogardel.blogspot.com/2020/11/gardel-artista-y-empresario.html
[1] Certaines publicités ne mentionnent pas l’escale de Cadix
[2] Ce sous marin fut attaqué le 14 avril 1942 par le torpilleur italien « Pegaso »
[3] Tango joué pour la première fois en 1928, au cinéma « Metropol » par l’orchestre de Roque Biafore.
[4] Gardel réalisa deux enregistrements de ce disque les 8 et 22 juillet 1927 (matrices n°1003 et 1003-1 respectivement), les deux fois avec les guitares de José Ricardo et Guillermo Barbieri
[5] ‘‘El Aviador’’ (l’aviateur) était le surnom de son chauffeur, Antonio Sumaje.
[6] Adamo Didur (1874-1946) chanteur d’opéra, basse préférée de Toscanini.
[7] Par erreur, en 1930, il est mentionné comme étant le capitaine du ‘‘Conte Verde’’.
[8] García Jiménez, “Vida de Carlos Gardel” (raccontée par José Razzano) Bs.As., 1946. (D’autres versions des faits existent et sont contraires à ces affirmations )